RevueSpiritualité

Pas de philosophie sans vie intérieure !


« Être philosophe n’est pas une question d’intelligence supérieure ou inférieure. C’est une question de profondeur », souligne le Président international de Nouvelle Acropole, Juan Carlos Adelantado Puchal.


Toute connaissance sans intériorité reste superficielle et instable. Découvrir cette profondeur, c’est apprendre à dépasser la surface des choses pour nous rapprocher du centre, c’est entrer en contact avec des choses essentielles mais qui sont invisibles à nos yeux physiques.
La profondeur s’acquiert par l’élévation, c’est-à-dire la capacité à jauger nos problèmes quotidiens avec des critères universels. Ainsi, chacun peut se déprendre de ses passions et développer peu à peu le contrôle de ses pensées, de ses émotions et de ses désirs. Ces finalités ont toujours été présentes, comme nous le rappelle notre directeur international : « les finalités des écoles de philosophie sont l’autarcie et l’ataraxie, c’est-à-dire la liberté qui empêche la dépendance et la capacité de ne pas être perturbé ».

Philosophie et vie intérieure : un chemin vers le centre

Bien souvent, notre existence se déroule à la périphérie de nous-mêmes, absorbés par les sollicitations du monde extérieur, contraints par nos automatismes et nos conditionnements. Nous croyons penser par nous-mêmes, mais bien souvent, nous ne faisons que répéter ce que notre éducation, ou les leitmotiv à la mode font tourner en boucle dans les réseaux sociaux.

La vie intérieure, au contraire, est un travail d’unification entre surface et profondeur, entre nos perceptions du monde, et notre conscience la plus élevée de nous-mêmes. C’est un chemin de retour vers soi, une ascension pour aller du multiple vers l’unité. L’image de l’Acropole, comme montagne à gravir pour atteindre le sommet de soi-même, exprime de manière juste ce cheminement pour se relier à son propre sommet qui éclaire et oriente toute notre existence.
La vie intérieure quand elle habite la philosophie, nous aide à percevoir la réalité au-delà des apparences, à discerner le permanent dans le transitoire, donnant un sens plus profond à nos expériences, nos relations, nos engagements.

Alors que notre époque favorise souvent la dispersion, faisant que le mental s’agite, les émotions s’emballent, les désirs se multiplient, la vie intérieure ne peut en aucun cas être un refuge ni un isolement. Elle est simplement une opportunité de nous recentrer pour parvenir à une présence plus authentique. Elle ne demande pas un temps particulier, car elle est la vie même, une vie philosophique, vécue dans une recherche de conscience à chaque instant.

La philosophie véritable ne se limite donc pas à l’activité intellectuelle. Elle suppose un lien conscient entre l’Homme extérieur en nous, qui fait se mouvoir nos pensées ordinaires et nos émotions quotidiennes et cet Homme intérieur, immuable, plus profond, qui constitue notre réalité essentielle. Le lien vivant entre ces deux réalités, est ce que nous pouvons appeler la vie intérieure.

Philosophie et exercices spirituels

Depuis l’Antiquité, les écoles de philosophie ont proposé des pratiques destinées à nourrir cette vie intérieure. Les stoïciens apprenaient à distinguer ce qui dépend de soi de ce qui n’en dépend pas ; les épicuriens invitaient à la simplicité et à la sérénité face à la mort ; les cyniques cultivaient la force de volonté, la résistance et la maîtrise de soi. Leur but commun : atteindre l’autarcie et l’ataraxie, signes de liberté intérieure.

Nouvelle Acropole s’inscrit dans cette continuité. Nous considérons la pratique des exercices spirituels, expression d’une véritable discipline philosophique, comme le patrimoine des écoles de philosophie, un héritage précieux pour la formation du caractère et la transformation de la connaissance en expérience. Ces exercices qu’ils soient de concentration, de réflexion, de silence, ou bien encore d’observation de soi visent à fortifier la volonté et à éveiller la conscience. Répétés avec persévérance, ils deviennent des appuis de dépasser la clé intellectuelle pour parvenir à une appropriation opérationnelle. Cette ascèse, ou askesis, est une méthode vivante : elle relie la philosophie à l’action et transforme la théorie en expérience vécue.

Philosophie pratique et altruisme

Sous peine de s’assécher, la philosophie ne peut être tournée exclusivement vers les concepts. Nourrie de la vie intérieure de chacun, elle devient rayonnante et féconde, irradiant naturellement vers le monde. En cultivant ce lien intérieur, nous pouvons agir avec justesse, en accord avec notre conscience et avec la Vie. Nous pouvons faire les liens, comprendre de l’intérieur, agir avec discernement et ne pas nous contenter de savoir intellectuellement. Relier philosophie et vie intérieure densifie l’individu et lui permet d’honorer ses convictions dans l’action, en assumant ses responsabilités envers lui-même et envers la société. Car, comme le souligne Carlos Adelantado, « c’est en nous souciant des autres que la vie intérieure se développe ».

Relier philosophie et vie intérieure demande de la constance, de la persévérance et une profonde sincérité. C’est un chemin authentique qui permet de sortir des concepts, et de rendre visible les idées invisibles, permettant à un peu de sagesse de se manifester dans notre vie quotidienne. Alors, comme le disaient déjà les Anciens, la philosophie cesse d’être un discours pour devenir un art de vivre.

Loin de toute approche académique ou exclusivement théorique de la philosophie, comprenons le bien, il n’y a pas de véritable philosophie sans vie intérieure. Notre société blasée, où règne l’impuissance et l’à-quoi-bon, a un immense besoin de ce retour aux sources revigorant pour redonner de la vitalité à la pensée, du bon sens à l’action, et un peu plus de dignité et de grandeur à nos existences.

photo : Victoria de Pixabay
Thierry ADDA
Président de Nouvelle Acropole France
© Nouvelle Acropole
La revue Acropolis est le journal d’information de l’école de philosophie Nouvelle Acropole France

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page