Philosophie

Les exercices spirituels philosophiques

Résister à la tentation

« La modération est la source de toutes les vertus »

Platon, La République, Livre III

Qui n’a jamais craqué devant quelque chose auquel il s’était promis de résister ? Il faut reconnaître que notre société de consommation sait s’y prendre pour surmonter nos bonnes résolutions. À coup de publicité et d’algorithmes, nous voyons petit à petit les mécanismes de dépendance se mettre en place : dépendance alimentaire au sucré/salé, aux réseaux sociaux, aux écrans, etc. pour ne pas parler des cas plus graves d’addictions à l’alcool ou à la drogue.

En quoi la philosophie peut-elle nous aider ? Parce que la philosophie est une voie pour apprendre à être libres, c’est-à-dire capables de nous en tenir à nos propres décisions. Pour se libérer des mécanismes d’emprise, de nombreux philosophes ont préconisé à travers les siècles des exercices spirituels, un peu rebutants au premier abord il faut bien le reconnaitre : abstinence, exercices de résistance physique et psychique. Le but de ces pratiques de privation était clairement l’exercice de sa volonté pour rendre l’individu plus autonome par rapport aux tentations du monde extérieur : le pouvoir, l’argent…
Voici l’exemple d’une pratique des Pythagoriciens. On se livre à des activités sportives qui ouvrent l’appétit puis on se place devant des tables chargées des plats les plus savoureux ; et, après les avoir contemplés, on les donne aux serviteurs tandis que soi-même on prend la nourriture simple et frugale d’un pauvre.

La modération reine des vertus

D’autres philosophes comme Sénèque ou même Épicure (qui n’était pas la fine gueule que l’on imagine), nous parlent de l’intérêt de ces petites mises à l’épreuve. Elles n’ont pas pour but de nous infliger des souffrances ni de transformer notre quotidien en un désert ascétique, mais de nous assurer que si ce dont nous nous privons volontairement nous manque un jour, nous n’en serons pas troublés.
Cette autolimitation à travers la modération de nos désirs nous permet de prendre également une meilleure conscience de nous-mêmes : il y a en nous Quelqu’un qui décide, et ce Soi, étranger au désir, est renforcé par ces pratiques. C’est ainsi que cette capacité de nous contrôler nous-mêmes a été érigée en pierre de voûte de la philosophie.

Pratique de la modération

Le but de cette pratique est donc d’apprendre à se maîtriser et à éviter les excès pour vivre en harmonie avec soi-même et les autres. Il s’agit de pratiquer la modération, c’est-à-dire de savoir rester dans les limites que nous avons définies.
Par exemple, dans son comportement alimentaire, dans la consommation d’alcool, de tabac, dans l’utilisation des technologies, etc. L’idée est de prendre l’habitude le matin, de définir pour la journée une limite pour quelque chose dont on se sent dépendant : par exemple limiter le temps de la consultation des écrans, ou alors la quantité d’aliments, le nombre de cigarettes, etc. Un défi par jour qui nous semble raisonnable. Ainsi nous pourrons l’atteindre et être victorieux et ceci nous encouragera pour le lendemain. Avec la politique des petits pas réguliers nous pourrons rectifier les comportements que nous trouvons peu adaptés. Si nous chutons ce n’est pas grave, nous serons plus motivés pour réussir le lendemain !

« Je considère plus courageux celui qui vainc ses désirs que celui qui vainc ses ennemis, parce que la victoire sur soi-même est la plus difficile. »

Aristote
Isabelle OHMANN
Formatrice en philosophie à Nouvelle Acropole
© Nouvelle Acropole
La revue Acropolis est le journal d’information de Nouvelle Acropole

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