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Écologie-Nature

La transition énergétique, un leurre ?

Le thème de la transition énergétique est brandi régulièrement comme réponse au phénomène de réchauffement climatique que nous avons engendré. Mais qu’en est-il ?

Chacun connaît l’anecdote des grenouilles dans la casserole d’eau chaude. Si vous les plongez dans l’eau bouillante, par instinct de survie, elles vont sauter hors du récipient pour ne pas mourir ébouillantées et seront sauvées. En revanche, placez-les dans la casserole remplie d’eau à température ambiante et chauffez peu à peu la casserole, et elles essayeront par moindre effort, de s’accoutumer progressivement à la température qui augmente jusqu’à périr bouillies !
Notre système matérialiste inventeur du concept de société de consommation et de loisirs nous a mis dans la position des grenouilles. Et je ne me réfère pas uniquement au réchauffement climatique.

Un peu d’histoire… Le passage au charbon a accentué la consommation de bois !

Nous avons tous lu dans nos livres d’histoire que la révolution industrielle avait fait passer de la civilisation du bois à celle du charbon qui avait permis de faire un grand pas en avant… Je ne discuterai pas sur le caractère approprié du pas en avant car tout dépend du contexte… terrain plat ou bordure de falaise…
Le recul historique nous permet de constater qu’il n’y a pas eu transition du bois au charbon, mais bien au contraire intensification de l’usage du bois pour produire du charbon. En effet, la production de charbon a nécessité d’énormes quantités de bois pour étayer les kilomètres de galeries de mines, puis pour placer des millions de traverses de chemin de fer pour alimenter les centrales à partir des mines. Ce qui a fait que les pays « en voie d’industrialisation » de l’époque ont vu leur consommation de bois multipliée par 3, par 6, voire par 10 sur le demi-siècle concerné !
Aujourd’hui, nous sommes confrontés à une situation analogue bien que plus alarmante car nous avons fait plusieurs pas en avant !

Les énergies renouvelables utilisées pour prolonger la vie des énergies fossiles

En dehors du fait que la production des énergies renouvelables soit en progression, on oublie de signaler qu’elles sont souvent utilisées aux fins de maintenir et améliorer l’usage des infrastructures d’exploitation des énergies fossiles. À titre d’exemple, le plus grand parc éolien d’Europe en mer du Nord sert à fournir une énergie qui permet de réchauffer le fond de réserve pétrolière très visqueuse afin de prolonger l’exploitation des champs…

Quand la transition verte nécessite davantage d’énergie fossile

Et pour ce qui nous est présenté comme des alternatives vertes durables, pour construire des « voitures vertes », on utilise énormément d’énergie fossile (sans parler des batteries qui nécessitent l’extraction aux énergies fossiles des terres rares) pour produire, l’acier, le plastique et tous les éléments composant le véhicule dans un processus qui, de plus, accélère « l’obsolescence » des produits qu’on cherche à remplacer. La même chose pour la confection des éoliennes à base d’acier produit par les hauts fourneaux à charbon… On pourrait multiplier les exemples.

Nous nous trouvons exactement dans la même situation (mais à un stade plus avancé) que durant la supposée transition énergétique du XIXe siècle : nous consommons infiniment plus d’énergie de l’ancien système pour produire un peu d’énergie « vertueuse » du nouveau, qui ne sera pas durable car sa maintenance dépendra des anciennes énergies comme nous le verrons tout de suite.

Une énergie de la nature n’est pas forcément une source d’énergie utilisable

Vincent Mignerot (1) explique la différence entre source d’énergie disponible et énergie. Le vent, l’eau, le soleil, ne sont pas des sources d’énergies disponibles car chacune de ces énergies naturelles exige des convertisseurs pour fournir de l’énergie utile à l’homme. Ces convertisseurs sont simples ou complexes : moulins à eau ou barrages, moulins à vent ou éoliennes, centrales nucléaires ou à biomasse, etc. Quant à l’hydrogène son usage ne sera que confidentiel compte-tenu de la gabegie énergétique que nécessite son extraction.

Une énergie « verte » n’est pas forcément utilisable de façon durable

Tous ces convertisseurs exigent un accès aux énergies fossiles pour être construits, ainsi que pour en assurer la maintenance ou le remplacement. En effet, dans un système physique régi par l’usure et la loi universelle de l’entropie, le mouvement perpétuel n’existe pas. Tout ce qui est produit doit à un moment donné être remplacé et il n’existe pas de système produisant plus d’énergie qu’il n’en consomme, c’est-à-dire qui pourrait assurer le surplus nécessaire à son entretien ou son remplacement. C’est pourquoi ces énergies vertes ne sont pas autoportantes et nécessitent d’autres énergies pour être converties.
Vincent Mignerot explique en résumé que les seules sources d’énergies disponibles et renouvelables sont le bois, la biomasse qu’on peut brûler, et les calories alimentaires que l’homme trouve dans le vivant.

L’effet-mirage des pourcentages

Dès qu’on parle de transition, on se félicite que le pourcentage des énergies propres s’accroisse. Mais, comme le montre très bien Jean-Marc Jancovici (2) dans ses conférences, ces taux de croissance ne réduisent pas la consommation d’énergies fossiles en valeur absolue. Ce n’est que la pente de la courbe de croissance qui s’infléchit un peu : leur consommation continue à croitre en parallèle de celles des énergies vertes. Au final, le volume de CO2 continue à augmenter car nous exigeons toujours plus d’énergie, tant à titre individuel que du fait de la croissance démographique de l’humanité !

Et si c’était notre modèle de société qu’il fallait changer ?

Si la notion de transition énergétique est au moins à discuter si ce n’est pas un leurre intellectuel, la solution essentielle pour l’avenir est très clairement un changement de société. Nous avons besoin de modèles d’épanouissement humain qui ne soient pas fondés sur la consommation et les distractions futiles, mais sur la qualité du relationnel et la solidarité, tant horizontale qu’intergénérationnelle. Il nous faut un effort tranquille mais régénérateur qui serve de ciment à la fraternité humaine.

(1) Essayiste français né en 1978, dont les travaux portent sur la collapsologie et la synesthésie
Collapsologie : courant de pensée transdisciplinaire apparu dans les années 2010 qui envisage les risques, causes et conséquences d’un effondrement de la civilisation industrielle
Synesthésie : condition neurologique qui combine des perceptions sensorielles entre elles ou avec des éléments de langage ou de connaissance. La synesthésie fait apparaître à la conscience une des façons qu’ont notre corps et notre esprit de travailler ensemble.
(2) Ingénieur, enseignant , écrivain et conférencier français né en 1962, créateur du bilan carbone qu’il a développé avec L’Agence de l’environnement et de la maîtrise d’énergie (ADEME). En 2018, il devient membre du Haut Conseil pour le Climat auprès du Premier ministre. Il anime des conférences sur le thème du réchauffement climatique. Selon lui, le modèle des sociétés occidentales est voué à la décroissance car leur système économique dépendant d’énergie provenant essentiellement des combustibles fossiles n’est pas pérenne.
Voir sur Youtube
Présentation de Vincent Mignerot aux Shifters suisse
https://youtu.be/LijMv4MWDbI
The Shifters (http://TheShifters.ch) est une association créée en 2010 par un groupe d’experts, jean-Marc Jancovici, Geneviève Férone-Creuzet et Michel Lepetit. L’objectif visé par l’association consiste en la décarbonation de l’économie au sens large

par Jean-Pierre LUDWIG
Formateur en philosophie

© Nouvelle Acropole
La revue Acropolis est le journal d’information de Nouvelle Acropole

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