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Société

Hommage à Jorge Angel Livraga

La philosophie à la manière classique à travers Nouvelle Acropole

Le 7 octobre 2021 sera célébré le trentième anniversaire de la mort de Jorge Angel Livraga qui a fondé en 1957 le mouvement international Nouvelle Acropole. Une occasion de revenir sur sa vie et sur le mouvement qu’il a dirigé avec enthousiasme et une grande lucidité sur son époque et son devenir.

 En 1987, au cours d’un entretien accordé à Délia Steinberg Guzman, qui lui a succédé à la direction de la O.I.N.A. (Organisation Internationale Nouvelle Acropole, de 1992 à 2021, Jorge Angel Livraga a apporté, sur l’esprit, le fonctionnement et l’objectif du mouvement qu’il a fondé, des précisions et des éclaircissements dont nous reproduisons ci-dessous des extraits.

Délia STEINBERG-GUZMAN : Jusqu’à quel point, lorsqu’un mouvement est fondé, s’agit-il de quelque chose de neuf ou de la répétition d’autres éléments similaires, antiques ou contemporains ?

Jorge Angel LIVRAGA : À l’époque actuelle, nous vivons aliénés par un principe dialectique : les choses sont noires ou blanches ; nous ne pouvons quasiment pas concevoir que le gris existe. Cela me rappelle un enseignement de mon maître Sri Ram, qui disait qu’il n’existe rien de blanc ni de noir mais seulement différentes tonalités de gris ; tant que nous sommes incarnés, nous ne pouvons accéder aux valeurs absolues.
Ces idées ne sont ni jeunes ni vieilles, bien plutôt elles ont toujours existé et, comme tout, réapparaissent comme le soleil le matin, comme le printemps ou l’hiver ; autrement dit, elles se réincarnent et prennent des formes nouvelles. Je crois que l’idéologie de Nouvelle Acropole a existé à diverses reprises dans le monde sous d’autres noms et que, lorsque ce nom aura été usé et détruit par les siècles, elle en prendra d’autres et continuera ainsi. 

D.S.G. : Pourrait-on dire que Nouvelle Acropole est la continuation d’un de ces mouvements philosophiques de l’Antiquité ou bien quelque chose de particulier à ce moment historique ?

J.A.L. : Elle est la continuation de ces mouvements philosophiques mais elle est à la fois propre à ce moment historique, de la même façon qu’aucun printemps ne peut se répéter, bien qu’il soit la continuation des milliers de printemps qu’il y a eu auparavant dans le monde…

D.S.G. : Pourquoi vous référez-vous à la philosophie de Nouvelle Acropole comme à une « philosophie à la manière classique » ?

J.A.L. : C’est pour la différencier de ce que l’on entend aujourd’hui par philosophie. Depuis l’époque de Descartes et particulièrement durant le XXsiècle, la philosophie est quelque chose d’abstrait qui traite seulement des causes premières, de l’être, mais ne se soucie pas de certaines réalités pratiques.
La philosophie classique ne se consacrait pas à l’étude exclusive des causes et des noumènes mais aussi – comme on le voit chez Platon – aux besoins politiques, sociaux et économiques que peut avoir l’homme.

D.SG. : Comment concilier ce concept de philosophie à la manière classique avec ce qui est ésotérique, comme vous l’avez fait durant votre jeunesse ?

J.A.L. : Parce que, à la base de toutes les philosophies classiques (nous appelons ainsi celles qui viennent de l’Antiquité préchrétienne bien qu’elles se soient ensuite prolongées), il y a toujours eu un fond ésotérique. La philosophie est la recherche de la vérité et la découverte de cette vérité inclut une forme de « théosophie » (indépendamment de la Société Théosophique), c’est-à-dire une connaissance des dieux et ses expressions formelles.

D.S.G. : Cette philosophie à la manière classique a-t-elle ses racines en Orient ou en Occident ?

J.A.L : Je la placerai à travers toute la Terre, étant donné que, selon les moments d’apogée, on l’a trouvée en Orient, en Occident, dans le continent américain et en d’autres lieux que nous ne connaissons plus parce que la recherche archéologique ne s’y intéresse pas. 

D.S.G. : Pourquoi alors le nom de Nouvelle Acropole qui nous ramène plutôt au classicisme grec et aux racines occidentales ?

J.A.L. : Je suis un Occidental, je travaille et je parle pour des Occidentaux et il est naturel qu’à ses débuts –bien qu’elle soit en train de s’étendre à toutes les parties du monde – Nouvelle Acropole ait été un mouvement occidental. Dans la mesure où le mot acropole signifie cité haute, cela aurait pu se dire en sanscrit ou en toute autre langue mais ceux qui m’entouraient alors n’auraient pas compris, non plus que ceux qui me lisent aujourd’hui. Il est évident que je ne me réfère pas à une cité haute de briques ou de ciment mais haute dans le sens spirituel.

D.S.G. : À travers ces trente années d’expérience, pouvez-vous nous parler des méthodes, des disciplines ou directives qu’utilise Nouvelle Acropole pour concrétiser son œuvre ?

J.A.L : Nous essaierons de résumer cela en quelques mots. Je crois, comme je l’ai toujours cru, que l’éducation peut faire beaucoup pour l’homme. Nous ne souhaitons pas une race de génies ou surhommes mais simplement des gens qui se respectent eux-mêmes et respectent les autres, qui croient fondamentalement en Dieu. 
Pour que puissent exister des gens comme ceux-là, nous pouvons donner une éducation nouvelle, une organisation nouvelle. Mais pour y arriver, il faut le faire petit à petit. Nous ne sommes pas pressés, nous ne voulons pas conquérir le monde. Nous voulons nous conquérir nous-mêmes et projeter ensuite sur les autres ces systèmes de base de rencontre avec soi-même, avec la Nature. Savoir ce que nous lèguent les philosophes de l’Antiquité, voir les failles des systèmes qui nous gouvernent… Enfin, un ensemble d’éléments qui vont créer ce que j’appelle « l’homme nouveau » ; c’est un homme nouveau qui ne va pas naître demain ni d’ici cent ans mais peut-être d’ici quelques siècles, qui existe cependant en germe dans cette Nouvelle Acropole philosophique, dans plus de quarante pays.

D.S.G. : Attribuez-vous à Nouvelle Acropole un caractère messianique, et vous considérez-vous comme le canalisateur de ce rôle ?

J.A.L : Je n’aime pas le mot messianique parce qu’il a des connotations religieuses que n’a pas Nouvelle Acropole. Nouvelle Acropole n’est ni une religion ni une secte. Par contre, je considère que cette forme philosophique de renouvellement, cette écologie spirituelle, peut nous laver de la crasse du matérialisme athée, de la violence déchaînée, de la pornographie, de l’abus de drogue et de tout ce qui entrave le développement de notre jeunesse, pour arriver à construire un monde plus juste, meilleur et plus beau. 

3D rendering of people forms world continents

D.S.G. : Vous affirmez que Nouvelle Acropole n’est pas une religion mais dans le programme d’études apparaissent des thèmes en relation ave les différentes religions antiques et avec les symboles religieux de tous les temps. Comment expliquer cela ?

J.A.L : Le mot religion – comme le mot yoga en sanscrit – signifie réunion : réunion des hommes entre eux et des hommes réunis en Dieu ; le mot ecclesia, église, a une signification similaire. 
Non, Nouvelle Acropole n’est pas une religion dans le sens actuel, si on la compare aux religions existantes et connues. Par contre, c’est une ré-union, un se re-lier des hommes entre eux, qui constitue le premier des principes que nous soutenons : former un noyau de fraternité universelle au-delà des différences de couleur, de sexe, de nationalité, etc., pour obtenir un noyau uni, capable de traverser l’âge qui approche, que je considère comme un âge obscur, un nouveau moyen-âge.
Par là, je ne veux rien signaler de catastrophique mais quelque chose d’aussi naturel que la systole et la diastole du cœur, comme l’hiver et l’été parmi les saisons. De la même façon, dans le déroulement des civilisations, il y a des époques de plus grande et de moindre lumière.  Celle qui approche est une époque de faible lumière, d’obscurité, de violence, de persécutions et je crois qu’un groupe suffisamment fort et instruit peut aider à la préservation des éléments culturels, comme cela est arrivé lors du Moyen-Âge occidental antérieur, à travers quelques groupes qui ont rendu possible une renaissance ultérieure.

Cet article sera suivi d’un second article, suite de l’entretien. 

Traduit de l’espagnol par M.F. Touret
Article extrait d’un article paru dans la revue Acropolis N° 128 (novembre-décembre 1992).
Propos recueillis par Délia STEINBERG GUZMAN
Présidente d’Honneur de Nouvelle Acropole

Va paraître                                                                                                    

Comment s’incarnent les rêves
par Jorge Angel LIVRAGA
Éditions Nouvelle Acropole, 2021, 288 pages, 17 €

Entre 1966 et 1991, Jorge Angel Livraga donna de nombreuses conférences à travers le monde. Visionnaire déjà à son époque, ses propos étaient déjà d’une actualité et d’une pertinence qui en disaient long sur son analyse philosophique de la société et les solutions qu’il préconisait. Il a tenté de rendre accessible à tout public la philosophie de tous les temps, héritière de la sagesse de l’humanité. Cet ouvrage regroupe une vingtaine de conférences organisées autour de trois grandes thématiques, base du programme d’études enseigné dans les écoles de philosophie de Nouvelle Acropole :

  • L’éthique pour apprendre à se voir soi-même,
  • La sociopolitique pour apprendre à résoudre les conflits et mieux vivre ensemble,
  • La philosophie de l’histoire pour faciliter la prise de conscience de la situation historique que nous sommes en train de vivre.
    Humaniste éclectique, Jorge Angel Livraga (1930-1991) a étudié les grandes doctrines philosophiques d’Orient et d’Occident, les civilisations et les cultures anciennes, et a exposé des synthèses inédites des connaissances traditionnelles du monde invisible. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles.
Livre à se procurer dans l’un des centres de Nouvelle Acropole (www.nouvelle-acropole.fr)
© Nouvelle Acropole 

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