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Philosophie

Journée Mondiale de la Philosophie 2019, Nietzsche, un philosophe hors norme

Instituée en 2005 par l’UNESCO, la Journée mondiale de la philosophie est célébrée chaque année le troisième jeudi du mois de novembre. Pour l’année 2019, le thème choisi « Le jardin des philosophes » permet de découvrir les philosophes qui constituent depuis des millénaires la sagesse ancestrale et atemporelle. Parmi eux, Friedrich Nietzsche (1844-1900), philosophe hors norme qui a suscité les interprétations les plus diamétralement opposées.

Vivre mieux ensemble est l’un des objectifs de la philosophie, mais jamais il ne doit être atteint au détriment de l’accomplissement de chacun des individus, libres et autonomes, qui composent nos sociétés humaines. Friedrich Nietzsche est un philosophe hors norme dans ce sens qu’il ramène toujours son lecteur à sa propre vérité. C’est une pensée qui ne se laisse pas érigeren système, une panoplie de fulgurances où chacun peut trouver « son Nietzsche ».

Nietzsche est un penseur qu’on peut servir à toutes les sauces. C’est lui, assurément, de tous les philosophes, qui a suscité les interprétations les plus diamétralement opposées. En fonction de l’angle sous lequel on prend ses textes, il y a matière à se nourrir d’un bout à l’autre de l’échiquier politique, de l’extrême droite : Nietzsche vantant la morale des maîtres contre celle des esclaves, Nietzsche hostile aux valeurs de l’humanisme et à la démocratie, à l’extrême gauche, Nietzsche le rebelle, le briseur d’idoles, opposé au nationalisme et à l’antisémitisme. Il inspire aussi bien les athées libertaires (Nietzsche l’antéchrist, appelant à libérer la vie dionysiaque qui est en nous) que les croyants en quête du divin (Nietzsche dénonçant le nihilisme et prévoyant les conséquences funestes de la mort de Dieu)

Un philosophe qui n’entre dans aucune case

On veut en faire un précurseur du monde de la technique, de la recherche de la puissance pour la puissance ? – En fouillant un peu, on trouve aussi bien dans ses textes des appels à se réenraciner, à vivre la puissance non pas comme un débordement de forces, mais comme la création d’une harmonie.

Quand Nietzsche critique les idéalistes, on se rend compte au bout du compte qu’il en est paradoxalement le plus grand défenseur.
Quand Nietzsche se moque des ascètes qui meurtrissent leurs corps en fuyant dans des arrières-mondes de l’esprit fantasmés, il finit par nous expliquer qu’il n’y a rien qui ait rendu l’homme plus intéressant que l’ascétisme. Dès qu’on veut le ranger dans une case, il s’échappe dans une autre. S’il nous présente une perspective, trois pages plus loin il renverse le tableau !

La pensée de Nietzsche est tout le contraire d’un système. Elle accueille la multiplicité créatrice de la vie. Ceux qui ont lu ses œuvres en long et en travers finissent tous par se construire une vision de « leur Nietzsche ». Et c’est très bien comme ça. Nietzsche est le philosophe des « esprits libres », et ce serait folie d’élaborer à partir de ses idées un projet politique, une morale dans le cadre d’une religion nouvelle, un ensemble de commandements pour diriger sa vie. Nietzsche n’est pas un sage. C’est un génie. Au fil des années, lecture après lecture, on laisse tomber les figures de catalogue : Nietzsche le chantre des jouisseurs, le roi des dandys ou le parangon des durs à cuire ; Nietzsche le révolutionnaire, le facho ou l’anarchiste ; Nietzsche le penseur de la tradition, de la modernité ou de la postmodernité !… Ses formules parfois si inhumaines (« Périssent les faibles et les ratés ! ») ne doivent pas faire oublier qu’il était, d’après ses amis les plus proches, le plus civilisé et poli des hommes.

La recherche de la vérité

Tout ce qu’on peut retenir de sa posture, si l’on ne veut pas tomber dans les clichés, c’est que Nietzsche est avant tout un philosophe dans la lignée de tous les philosophes qui l’ont précédé (bien qu’il les ait abondamment critiqués !). Ce qu’il veut, c’est la vérité. Son entreprise généalogique visant à identifier, au-delà des idéaux de façades, les pulsions vitales et mobiles psychologiques qui ont conduit, de tous temps, à échafauder de belles et hypocrites visions du monde, est précisément la marque de son exigence extrême de probité. Les philosophes eux-mêmes se fourvoient souvent quand il croit toucher à quelques vérités universelles ; lorsqu’ils trouvent « l’être », ils ne font le plus souvent que projeter leurs états affectifs sur une idée. Nietzsche ne démarque pas du lot sur ce point, mais il a, sans doute plus que les autres, oser le feu d’artifice. Ses pensées sont des fulgurances qui réveillent, émerveillent, choquent, étourdissent. Et pourtant, derrière l’image du pyromane qui met le feu aux enseignes du prêt-à-penser se cachent un amoureux de la vérité qui, tel un chercheur d’or, passe au tamis tous les systèmes de valeurs afin de trouver les rares pépites que charrient les flots de l’histoire de la pensée humaine.

Pour agir ensemble, nous avons besoin de systèmes de pensée, de visions mentales du monde, même simplistes et trompeuses, mais lorsque le cadre qui circonscrit nos esprits nous étouffe, rien ne vaut une bonne cure de Nietzsche ! Démolir et rebâtir plus grand, jusqu’à atteindre l’éternité – voilà peut-être le seul leitmotiv du philosophe au marteau. Comme il l’affirme lui-même dans Ainsi parlait Zarathoustra : « J’aime les églises et les tombeaux des dieux, quand le ciel regarde d’un œil clair à travers leurs voûtes brisées ; j’aime à être assis sur des temples détruits, semblable à l’herbe brillante et au rouge pavot. – Ô comment ne serais-je pas ardent de l’éternité, ardent du nuptial anneau des anneaux – l’anneau du devenir et du retour ? Jamais encore je n’ai trouvé la femme dont j’aimerais avoir des enfants, si ce n’est cette femme que j’aime : car je t’aime, ô éternité ! »

Dans notre société hantée par le mythe de l’effondrement, peut-être la lecture de Nietzsche, à l’occasion de la Journée Mondiale de la Philosophie, peut nous aider à changer notre regard, non pas pour éviter l’inéluctable, mais pour nous tenir joyeusement au milieu des ruines – et ne pas perdre des yeux le ciel étoilé !

Nietzsche, la quête d’éternité
Fabien AMOUROUX
Éditions Ancrages, 2017, 90 pages, 8 €

Par Fabien AMOUROUX

 

 

Journée mondiale de la philosophie 2019
« Le jardin des philosophes »

Instituée en 2005 par l’UNESCO, la Journée mondiale de la philosophie est célébrée chaque année le troisième jeudi du mois de novembre. Toutes les écoles de l’association internationale Nouvelle Acropole (410 écoles) s’associent à cet événement pour proposer des activités en relation avec la philosophie comme moyen d’éduquer tous les êtres humains sans distinction, afin que tous puissent vivre dignement et comprendre leur utilité dans la société et dans le monde : conférences, expositions, café-philo, spectacles artistiques…

En France et pour l’année 2019, les 13 écoles de Nouvelle Acropole France ont choisi d’exprimer sous toutes ses formes le thème Le jardin des philosophes.« Il faut cultiver votre jardin » disait Voltaire. Car la philosophie nous aide à cultiver notre jardin intérieur, pour vivre la sérénité et nous ré-enchanter.

Activités de la Journée mondiales de la philosophie : www.nouvelle-acropole.fr

 

 

 

 

 

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