Philosophie

Le cancer du séparatisme  

Quand, il y a quelques années, nous assurions, dans nos écrits et nos conférences, qu’un nouveau moyen-âge approchait, ce pronostic semblait exagéré et quasi fataliste. 

Nous expliquions également que la répétition des cycles historiques ne devait pas forcément être considérée comme une fatalité ou une régression mais comme la marche naturelle de la Vie, où les lignes circulaires et spiralées indiquent un lent progrès qui touche des points semblables bien qu’à des niveaux différents d’évolution. 

Période intermédiaire et séparatisme

Loin, donc, du fatalisme et plus loin encore de l’exagération, aujourd’hui les faits confirment ces vieilles paroles. Très nombreux sont maintenant les auteurs et les chercheurs qui nous présentent le phénomène d’un moyen-âge comme résultant des derniers siècles vécus, comme parvis d’attente et de récupération préalable à une possible – nommons-la ainsi – Renaissance.
Les caractéristiques qui signalent la présence d’un cycle intermédiaire pour notre civilisation sont variées. Et parmi elles, il y en a une qui nous intéresse particulièrement pour les graves complications qu’elle peut entraîner si on ne la reconnaît pas dans sa véritable portée. Il s’agit du séparatisme. 

Le séparatisme, une force de dissolution

Au-delà des significations politiques – bien qu’elles soient également incluses – le séparatisme est une force qui s’infiltre dans toutes les expressions humaines, tel un courant qui tend à dissoudre tout ce qui a été fait jusque-là, conduisant la cellule à s’opposer à une autre cellule ; en conduisant à un individualisme à outrance qui enferme chaque être en lui-même  avec sa propre réalité. 
Des termes comme : liberté, indépendance, autonomie, libre expression, autodétermination et tant d’autres, ne sont plus que des synonymes du processus de séparatisme. Aujourd’hui, les nations se divisent en provinces et en régions qui prétendent à une originalité absolue et à une capacité suffisante pour vivre. Mais le processus se poursuit et les régions et provinces continuent à se diviser en sections plus petites, sur la base de toute différence ou distinction qui peut être signalée. Peu après, une commune se séparera d’une autre et même dans le cadre des familles elles-mêmes on commencera à remarquer cette fissure qui fera s’affronter sans remède les générations.

Séparatisme et isolement

Quand, pour finir, un homme sera seul  et qu’il sera séparé de tous les autres, que se passera-t-il alors ? Nous serons au cœur du nouveau moyen-âge. Chacun devra se débrouiller par lui-même dans les questions les plus simples et toutes les réussites civilisationnelles fondées sur le travail collectif et sur la coopération auront disparu. Peut-être dans le présent a-t-on du mal à concevoir un monde sans communications, avec des routes coupées, sans combustibles, sans fluides énergétiques, peut-être s’avère-t-il  presque impossible d’imaginer des bâtisses isolées au milieu des champs et de grandes cités abandonnées par impossibilité d’usage… mais tout cela est en gestation dans le courant du séparatisme. 

Renouer les liens pour renaître

Néanmoins, tout comme il y eut d’autres nombreux moyens-âge et tout comme l’homme s’est sorti de tous, il renaîtra de la même façon de cette période étrange qui l’attend. Mais pour renaître, un éveil est nécessaire, une raison solide qui permette de reconnaître les erreurs actuelles pour les remplacer par des réussites futures. 
L’homme est un être social. La famille, le village, la terre qui l’a vu naître sont des attachements chers qu’on ne peut effacer de la nature humaine. Il suffit de renforcer  sainement ces liens. Il suffit de débarrasser cette plante civilisatrice de ses parasites, pour que le prochain moyen-âge passe comme un songe rapide sur nous et, à travers sa brève heure de repos, se lève puissante et brillante l’aurore d’un Nouveau Monde.
Nouveau et, par conséquent, meilleur. 

Extrait de l’ouvrage de Délia Steinberg Guzman, El Heroe cotidiano, page 19
Traduit de l’espagnol par M.F. Touret
par Délia STEINBERG-GUZMAN
Présidente d’honneur de l’Organisation internationale de Nouvelle Acropole (OINA)
© Nouvelle Acropole
La revue Acropolis est le journal d’information de Nouvelle Acropole

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