Arts

« Le chant des étoiles » de Fabienne Verdier

Le retable d’Issenheim, a inspiré Fabienne Verdier, célèbre artiste peintre formée à la calligraphie en Chine avec les derniers maîtres traditionnels, pour une exposition monumentale, baptisée « Le chant des étoiles », qu’elle a réalisée pendant le confinement et qui durera jusqu’au 27 mars 2023.

Fabienne Verdier est née le 3 mars 1962 à Paris. Après un diplôme de l’École des Beaux Arts de Toulouse, elle part en Chine en 1983 pour travailler avec les derniers grands peintres chinois et obtient son diplôme chinois en 1989. Puis elle est attachée culturelle à l’ambassade de France en Chine de 1989 à 1991.

Un art inspiré par différents courants

Elle raconte son séjour chinois dans Passagère du silence, livre publié en en 2003 chez Albin Michel, qui reçoit plusieurs prix, et est traduit en six langues. Durant les dix ans qu’elle passa en Chine, Fabienne Verdier a été formée à l’art du trait, mais aussi à l’ascèse et à la méditation taoïstes, par les plus grands maîtres calligraphes. Elle maîtrise non seulement les techniques de la peinture et de la calligraphie chinoises, mais aussi l’esprit et la philosophie qui les sous-tendent et son œuvre personnelle marie l’inspiration orientale à l’art contemporain.
Elle en témoigne dans son extraordinaire livre d’art L’Unique Trait de pinceau (Albin Michel, 2001) où les créations sont des interprétations de poèmes anciens et d’idéogrammes exprimant des concepts philosophiques, ou des voyages dans l’univers minéral et végétal. Les textes qui accompagnent les œuvres expriment une profonde communion avec la nature.

L’art calligraphique exige une implication totale du corps et de l’esprit. Après des heures de silence et de concentration, toute la difficulté réside dans le fait qu’une fois le geste amorcé, le sort du tableau est joué sans qu’il soit possible de revenir en arrière : « La règle se fonde sur l’Unique Trait de pinceau », écrivait au XVllle siècle Shitao, l’un des plus grands peintres chinois. L’Unique Trait de Pinceau est l’origine de toutes choses, la racine de tous les phénomènes. »

Un itinéraire artistique qui évolue

Elle commence à développer sa propre peinture abstraite en 2005. Elle s’intéresse d’abord aux expressionnistes abstraits, puis en 2009, fascinée par la force des primitifs flamands du XVe siècle, elle crée un ensemble de tableaux, inspirés par six œuvres majeures, exposés en 2013 à Groningen et à Bruges à côté des tableaux qui l’ont inspirée. Elle est inspirée aussi par les fresques italiennes et les maîtres du Quattrocento.
À partir de 2010, Fabienne Verdier intervient régulièrement dans l’architecture, à Rome, puis à Paris. Spécialiste des œuvres monumentales, elle décide de couper le manche de son grand pinceau et d’y greffer un guidon de vélo, pour gagner en mobilité et met au point une nouvelle technique qu’elle nomme « Walking Painting».
En 2018, Fabienne Verdier explore la dimension de la lumière et crée les trois vitraux du chœur de l’église Saint-Laurent à Nogent-sur-Seine. Puis elle travaille avec des musiciens en 2017.
En 2019 a lieu une rétrospective de son œuvre à Aix-en-Provence. Elle peint dans la nature, avec l’un de ses pinceaux monumentaux, composé de plus de vingt queues de cheval. L’exposition retrace les années de formation en Chine (1983-1992), la lente déconstruction du signe (1992-2007), le travail autour des maîtres flamands (2009-2013), les œuvres nées avec des musiciens (2014-2017), la série sur le vide, Vide-Vibration (2013-2017), et les travaux sur le motif autour de la montagne Sainte-Victoire (2018-2019).
En octobre 2022, l’exposition consacrée à Fabienne Verdier au musée Unterlinden à Colmar, place son parcours sous le double signe de la mort et de la transfiguration.

« Le chant des étoiles »

L’installation gigantesque de Fabienne Verdier au Musée Unterlinden baptisée Le chant des étoiles est composée de 76 toiles colorées et monumentales réalisées en 2020 et représentant les millions de morts de la pandémie. Elles sont considérées par l’artiste comme des icônes de consolation et des allégories entre la vie et la mort. Fabienne Verdier s’inspire directement de La Résurrection du Christ de Mathias Grünewald, dont l’aura de lumière représente une forme archétypale essentielle, l’épiphanie, qu’elle reprend dans ses formes circulaires colorées.
Elle compare notre fin de vie à celle des étoiles et fait dialoguer l’art, la spiritualité, l’astrophysique – elle cite Trinh Xuan Thuan –.
Elle a aussi collaboré avec une lexicographe et chaque peinture porte un prénom inspirant issu de différentes cultures comme Djihannour , Rayon de paix en tatar, Katiravan « Le rayonnant » en tamoul, Tiankong « Vide du ciel » en chinois, etc.
Elle travaille d’abord longuement les fonds en utilisant la technique des glacis, puis réalise la forme principale avec l’un de ses pinceaux monumentaux. En se tenant debout directement sur le châssis, elle utilise des outils qu’elle a elle-même mis au point. Elle met en forme la matière pour exprimer les forces vitales fondamentales.
Les toiles convergent vers un monumental Vortex qui nous emmène en apothéose dans sa spirale ascendante blanche.
Fabienne Verdier cite Platon : « Mourir n’est pas mourir, c’est changer », et Anaxagore : « Tout est cercle ». Elle nous dit qu’elle a mis une vie à comprendre cette idée que tout naît du cercle.

Fabienne Verdier nous fascine par sa profondeur, c’est une exposition inspirée à ne pas manquer !

À lire
Fabienne Verdier, La passagère du silence, Albin Michel, 2003
Fabienne Verdier, L’unique trait de pinceau, Albin Michel 2001
Bérangère Baucher, Fabienne Verdier, le chant des étoiles, Five Continents Editions, 2022
Laura Winckler, La passagère du silence, dix ans d’initiation en Chine par Fabienne, paru dans la revue Acropolis N° 186 (janvier-février 2005)
Leonie Behlert, Fabienne Verdier, artiste philosophe, paru dans la revue Acropolis N° 209 (mai-aout 2009)
Le chant des étoiles
Exposition de Fabienne Verdier
Jusqu’au 27 mars 2023
Musée Unterlinden
Place des Unterlinden, 68000 Colmar
Accueil téléphonique du lundi au vendredi de 8h à 12h : +33 (0)3 89 20 15 50
https://www.musee-unterlinden.com/expositions/exposition-fabienne-verdier/
https://www.rainbowpaintings.art/films/c/0#1
par Monique WEHR
Membre de Nouvelle Acropole Strasbourg
© Nouvelle Acropole
La revue Acropolis est le journal d’information de Nouvelle Acropole

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