Société

Éditorial : Le Volontariat ou la Philosophie sans le savoir …

Avec plus de 16 millions de bénévoles œuvrant en France, dont 13 millions dans le tissu associatif, et plus de 5 millions de volontaires impliqués dans des actions chaque semaine, nous sommes face à un panorama qui contraste diablement avec les discours sur la sinistrose ambiante.

Quand on ajoute que cet engagement est en en progression de 37% pour les moins de 35 ans et de 35% pour les 35-49 ans (1), avec une grande part des volontaires (60%) qui considèrent être plus actifs et impliqués au vu du contexte social actuel, une autre réalité apparaît, trop souvent invisible dans les médias. 

Le don de soi au quotidien ne fait pas le buzz, mais il permet de faire société en offrant une réponse probante à la crise d’individualisme aigüe des sociétés occidentales.

Le volontariat se distingue du bénévolat par le caractère formel de l’engagement pris, par la durée et le caractère organisés de l’action. À l’action généreuse du bénévole, le volontariat ajoute un cadre de sens, de finalités, de valeurs avec même une charte comme ce fut le cas pour les Jeux Olympiques 2024, où ils furent 300 000 à candidater, et 45 000 à œuvrer. Derrière ces chiffres qui donnent le vertige, apparaît un besoin simple, un besoin de l’âme, être utile à ce qui fait sens.

Tous ces hommes et ces femmes qui donnent le meilleur d’eux-mêmes pour tisser des liens, luttent à leur niveau pour le bien commun contre l’isolement et la fragmentation qui nous menacent. Ils n’ont pour la plupart probablement pas lu Aristote, mais ils partagent avec lui sans le savoir, la conviction que l’épanouissement humain ne se trouve pas dans l’accumulation de biens matériels et ils comprennent de l’intérieur, jour après jour, que l’homme ne réalise pleinement son humanité qu’en vivant vertueusement au sein de la collectivité. Comme disait Aristote dans son traité sur la politique : « La cité a pour fin le souverain bien. Si les hommes vivent ensemble dans des cités, ce n’est pas seulement parce qu’ils ne peuvent pas faire autrement, c’est pour atteindre le plus haut et le plus grand des biens. »

Tous ces volontaires font de la philosophie, comme monsieur Jourdain faisait de la prose, sans le savoir !
Ils affirment avec leurs actions quotidiennes que l’intérêt ne fait pas tout, que l’argent n’achète pas tout, et que la liberté philosophique d’un engagement choisi par altruisme au service d’une cause juste ne peut jamais être remplacé. 

Le volontariat permet une grande satisfaction personnelle, et un sentiment d’accomplissement irremplaçable, celui d’avoir fait sa part, d’avoir agi et pas seulement parlé.

Face à la désaffiliation croissante des citoyens vis-à-vis des structures sociales actuelles, le volontariat permet de réinventer des formes d’engagement basées sur le lien. Au plus près de l’humain, là où les besoins sont sous notre nez, l’incroyable tissu associatif de notre pays invente chaque jour de nouvelles formes de résilience.
Dans cette aspiration à transcender les préoccupations individuelles pour participer activement au bien de tous, le volontariat fait vivre humblement la pensée des anciens philosophes de l’Antiquité, que ce soit Aristote et sa conception de la Cité comme lieu de réalisation du bien supérieur ou Sénèque qui disait dans ses lettres à Lucilius : « Fais-moi un homme qui place le bien d’autrui avant le sien propre, qui se sente utile à ses semblables et qui prenne plaisir à servir ses frères d’humanité. » (Lettre 120)

Loin du consumérisme que l’on présente comme incontournable, ils sont ainsi des millions à penser que le bonheur individuel est étroitement lié au bonheur des autres, que le service désintéressé et le choix d’aider sans attendre de retour procurent un véritable bonheur, une joie durable, une joie qui naît du don de soi. Alors, on comprend bien pourquoi vivre en Philosophe ne repose pas simplement sur l’amour de la sagesse mais aussi et surtout sur notre capacité à pratiquer la sagesse de l’amour, la sagesse du don.

C’est la raison profonde pour laquelle la pratique du volontariat est indissociable de la philosophie à Nouvelle Acropole, parce qu’il permet de recréer ces espaces d’interaction et de solidarité dont nous avons tant besoin, ces espaces où les individus apprennent en agissant, mus par le plus beau des sentiments par les temps qui courent, le sentiment de responsabilité.

(1) https://www.francebenevolat.org/accueil/presse/l-volution-de-l-engagement-b-n-vole-associatif-en-france
Thierry ADDA
Président de Nouvelle Acropole France
© Nouvelle Acropole
La revue Acropolis est le journal d’information de Nouvelle Acropole

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