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Société

Ne faisons pas la grue pour 2022 !

Dans l’une de ses réflexions concernant la société (1), Jorge Angel Livraga nous explique, qu’à travers Le Politique (2), « Platon nous rapporte une parabole que nous pourrions appeler la parabole des grues. Elle nous raconte qu’en des temps très reculés, quelques grues commencèrent à se reconnaître entre elles, mais étant de peu d’intelligence, la seule différenciation à laquelle elles étaient parvenues dans ce monde était qu’il y avait des grues et des non grues. « Si la grue était douée de raison, elle diviserait les vivants entre les grues et tous les autres, unis indistinctement dans un seul bloc. »Ce dernier groupe était composé des poissons, des arbres, des oiseaux, des hommes, etc. ». Platon critique cette attitude et nous dit que, malheureusement, c’est celle de la majorité des hommes qui divisent le monde en deux : leur communauté et le reste, le reste étant considéré comme étranger ou différent et donc mauvais ou dangereux.

Pendant cette année qui bientôt va s’achever, dans nos 450 écoles réparties dans le monde, nous avons réfléchi et dialogué sur un thème commun : l’identité.

L’identité sépare le soi du non soi, le replie sur lui-même. L’identité est donc ce qui marque l’unicité et indique que chaque individu est différent des autres. Mais finalement, l’identité est ambiguë. Elle marque autant la différence que la ressemblance. Différence et ressemblance prennent sens l’une par rapport à l’autre en s’opposant et en s’interpénétrant. L’ambiguïté réside dans cette dynamique. 

L’identité s’évanouit fondamentalement dès lors que l’on veut l’enfermer dans une définition. Mais elle peut s’entendre comme le résultat de tous nos choix et comme le sens que chacun décide de donner à ses actes pour devenir responsable.

Être reconnu par l’autre, mais aussi reconnaître l’autre, c’est ce qui permet de se retrouver, de s’orienter et de se situer.

L’Identité collective simplifie et élude les différences internes et renforce les différences externes. Là est son succès, là également est son danger.

La notion d’identité culturelle amène à se poser la question des fondements d’une aspiration aux valeurs universelles. Il y a comme un brouillage conceptuel qui associe et confond souvent valeurs et traditions.

Nous devons distinguer les valeurs dont le caractère universaliste pourrait nous relier, des traditions qui peuvent demeurer en toute légitimité, particulières et ceci serait une piste pour sortir de l’impasse et gérer en même temps ce qui nous relie et ce qui nous distingue. 

Aujourd’hui nous assistons à un foisonnement de poussées de revendications identitaires. Il témoigne de l’affaiblissement du civisme. La citoyenneté ne consiste pas à supprimer les identités particulières légitimes mais à les dépasser, dans le partage de l’espace public commun, celui des citoyens dotés des mêmes droits et des mêmes devoirs. Avec l’affirmation de l’idée que toutes les vérités sont relatives, chacun place sa vérité sur un pied d’égalité avec celles des autres et renonce à la quête d’une vérité commune et donc à un intérêt et à un idéal communs.

Il s’est opéré un glissement depuis la légitime défense des minorités fondée sur les droits civiques vers une revendication d’une multitude de droits particuliers.

Alors, si tout se vaut, il n’y a plus rien de vrai et par conséquent, c’est le mensonge qui se substitue, permettant l’éclosion de tout ce que nous connaissons aujourd’hui sous le nom de fake news (3).

S’agissant de la défense des minorités, on est passé d’une lutte fondée sur les perspectives universalistes comme celles de Martin Luther King ou de Nelson Mandela, à des revendications au nom de différences rendues absolues. 

Aujourd’hui, il nous manque un projet commun qui favorise l’intégration de toutes les populations, celui de la recherche d’un bien commun, d’un bien supérieur, au-delà des convictions particulières. 

Notre philosophe centenaire Edgar Morin, nous rappelle qu’« être humaniste, ce n’est pas seulement savoir que nous sommes semblables et différents, ce n’est pas seulement vouloir échapper aux catastrophes et aspirer à un monde meilleur. C’est aussi ressentir au plus profond de soi que chacun de nous fait partie d’une communauté humaine et peut en être acteur » (4).

Voilà ce qui devrait nous faire réfléchir pour envisager l’année 2022 autrement.

Je vous souhaite chaleureusement une bonne année 2022 !

(1) Comment s’incarnent les rêves, Jorge Angel Livraga, Éditions Acropolis, 2021, 288 pages, 17 €.
Lire un extrait du livre dans la revue page 31
(2) Le Politique de Platon
(3) Fausses nouvelles
(4) Citation tirée de l’interview d’Edgar Morin, Nous devons apprendre à naviguer dans un océan d’incertitudes par Hugo Albandea, paru dans la revue Sciences humaines N° 342 (décembre 2021) page 28 
par Fernand SCHWARZ
Fondateur de Nouvelle Acropole France
© Nouvelle Acropole

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