Symbolisme du désert
Lieu de punition, lieu de transformation ou d’épreuves, le désert est présent dans de nombreuses traditions.
Il y a deux manières d’interpréter le symbolisme du désert : la première est de le considérer comme un symbole de l’indifférenciation primitive qui contient potentiellement toutes les formes de manifestation, et la seconde est de considérer l’énorme étendue de sa surface sèche et stérile – une terre apparemment aride et inhospitalière –, mais sous laquelle on peut trouver de vrais trésors si l’on fait l’effort de les chercher.
D’un lieu de punition…
Le désert est pour de nombreux auteurs l’antithèse du paradis, le lieu où Adam et Eve furent jetés après leur expulsion de l’Eden, en punition de leur désobéissance. C’est un lieu de pénitence désolé et inclément, qui signifie pour l’homme un monde solitaire et éloigné de Dieu, dans lequel il doit subir toutes les tentations et surmonter les plus dures épreuves pour découvrir le trésor de son propre être.
… à un lieu de l’uniformité primitive et indifférenciée…
Sankarâchârya (1) utilise le symbolisme du désert dans le premier sens, pour signifier l’uniformité primitive et indifférenciée, en dehors de laquelle rien n’existe que de manière illusoire, à la manière d’un mirage. Et pour maître Eckhart le désert, dans lequel seul Dieu règne, est l’indifférenciation retrouvée par l’expérience spirituelle, identique à la mer du symbolisme bouddhique. Pour Angelus Silesius (2), la divinité est dans le désert, et il dit même « je dois monter encore plus haut, au désert, pour trouver Dieu », c’est-à-dire qu’il faut aller jusqu’à l’indistinction du commencement, à l’Un indivisible pour découvrir et reconnaître l’illusion de la multiplicité.
… en passant par un lieu d’épreuves
Bien que cela semble un paradoxe, nous pourrions dire que le symbole du désert est l’un des plus fertiles de la Bible. C’est pour cela qu’il devient un symbole de la terre maudite par Dieu après le péché de nos premiers parents, mais il nous parle aussi d’un lieu de pénitence et de purification, où les moines chrétiens se retirent volontairement en ermites pour expier leurs fautes. Du point de vue biblique, le désert est l’équivalent des « épreuves », et il est synonyme de discipline, de processus évolutif. Jésus fut conduit par le Saint-Esprit dans le désert et, après une période de jeûne de quarante jours et quarante nuits, il dut subir les épreuves des trois tentations de Satan et les vaincre avant de commencer sa vie publique dans laquelle il manifesta son message au monde.
Un autre des personnages historiques qui fut éprouvé dans le désert fut Moïse. Le grand chef de l’Ancien Testament apprit dans le désert toute la sagesse qu’il n’avait pu obtenir dans les grandes écoles d’Égypte, dans les Maisons de Vie où il fut éduqué. C’est dans le sable chaud et inconfortable du désert que Dieu fit fondre la rudesse de son caractère pour pouvoir ensuite lui confier la direction du peuple élu.
Charles Swindoll l’a déjà dit : « Rien de tel que le désert pour découvrir qui nous sommes vraiment. Lorsque tu te dépouilles de tous les ornements, que tu enlèves les masques et te débarrasses de tous les déguisements, tu commences à voir une identité que tu ne connaissais pas jusque-alors et qui est la tienne propre »
Accueillons le désert ! C’est l’école qu’utilise le destin pour nous éprouver. Ne nous affligeons pas ou ne perdons pas notre joie intérieure lorsque nous traversons le désert confus des épreuves. Soyons-en reconnaissants et profitons-en plutôt pour brûler toutes les scories que nous avons accumulées. Les fournaises ardentes du désert ne brûleront que ces scories, mais l’or de l’âme deviendra plus pur.