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« La puissance des philosophes antiques »

L’importance du champ politique

Les philosophes antiques offrent une pensée toujours neuve, et leur route croise sans cesse la nôtre. Penser, c’est s’éveiller, c’est être toujours neuf. Les philosophes antiques sont les plus jeunes de nos sages occidentaux, les premiers à avoir voulu vivre éveillés. 

Voici un extrait du livre La puissance des philosophes antiques.

Pour un Grec, la politique a un champ plus étroit que pour nous, puisqu’elle concerne les affaires de la cité. Ne pas vivre dans une cité, pour un Grec de l’époque classique, c’est ne pas vivre de manière civilisée. En même temps, la cité grecque possède une visée universelle ou du moins générale. Les affaires de la cité ont une extension beaucoup plus large que pour nous aujourd’hui. 
Si nous avons des événements politiques, des hommes politiques, des moments politiques, comme ceux des élections par exemple, pour les Grecs, toute la sphère de la vie publique est politique, et la sphère privée est beaucoup plus étroite que pour nous. Ni l’éthique, ni la religion, ni les questions d’éducation ne sont en dehors du champ politique. Cela ne veut pas dire que tout soit politique pour autant. L’économique, par exemple, appartient pour eux à la sphère privée et concerne la gestion des patrimoines. Le mot « économie » vient des mots oikos et nomos ; oikos, c’est la maison, la propriété ; nomos, la loi, la coutume. 

Le champ politique embrasse toutes les activités et pratiques qui doivent être partagées, c’est-à-dire qu’ils ne sont le privilège exclusif de personne, ce sont toutes les activités relatives à un bien commun. Ainsi, faire de la politique, participer à la vie commune, n’est pas pour les Grecs une activité parmi d’autres, c’est l’activité noble par excellence. On méprise l’homme qui fait des affaires, car ce sont forcément des affaires privées. Le destin d’un jeune Athénien brillant ne saurait être que la carrière politique, qui n’a justement rien d’une carrière. 

Pourquoi les philosophes grecs valorisent-ils tant le politique ? Parce que les Grecs n’ont pas la notion de réussite privée. L’homme qui réussit est celui qu’on reconnaît publiquement comme tel, aux yeux de tous. La langue grecque désigne d’un seul mot « kalos » ce qui est beau, ce qui est reconnu, ce qui est objet d’admiration, d’un point de vue moral ou esthétique. Ceci veut dire que ce qui est beau doit être aussi bon. C’est l’idéal prôné par les philosophes grecs, celui du kaloskagathos, de générer en même temps le beau et le bon. La réussite politique est la seule réussite possible puisqu’elle est publiquement sanctionnée, et reconnue au service des hommes de la cité.  

La politique est donc à la fois un privilège et une obligation. En politique, les hommes doivent se montrer les meilleurs des hommes puisqu’ils œuvrent pour le bien commun. L’excellence politique regroupe toutes les autres excellences ; le champ politique exige une compétence universelle. Dans l’assemblée délibérative d’une démocratie directe, comme à Athènes, où il n’y a pas d’élus, tous les citoyens doivent se prononcer sur tous les sujets d’intérêt général. Le citoyen doit donc faire preuve de toutes les qualités morales : justice, piété, sens de l’honneur, sens du sacrifice. Enfin, la politique permet la réalisation de soi, l’expression effective de ce que l’on porte de meilleur en soi. Il n’y a donc pas de réalisation de l’individu en dehors du cadre de la cité. 

À lire
La puissance des philosophes antiques
par Brigitte BOUDON
Édition Maison de la Philosophie
Collection Petites Conférences philosophiques, 2017, 64 pages, 8 €

Par Brigitte BOUDON
Formatrice à Nouvelle Acropole Marseille
Fondatrice de la Collection Petites conférences philosophiques

© Nouvelle Acropole

La revue Acropolis est le journal d’information de Nouvelle Acropole

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