Les exercices spirituels philosophiques : # 18 Savoir perdre

« Lorsqu’une porte du bonheur se ferme, une autre s’ouvre ; mais parfois on observe si longtemps celle qui est fermée qu’on ne voit pas celle qui vient de s’ouvrir à nous. »
Helen Keller
Qui aime perdre ? Personne semble-t-il ! Parce que, pour tous, la perte signifie la dépossession de quelque chose. Perdre son temps, un objet mais aussi vivre la fin d’un moment agréable comme le week-end ou les vacances, tout cela est susceptible de nous chagriner. Sans parler de l’ébranlement que nous causent des pertes plus importantes, telles que celle d’un emploi, un divorce, un deuil…
Et pourtant la perte fait partie de la vie. Rien n’est stable ni ne reste égal à lui-même. Tout bouge et évolue. C’est le grand philosophe présocratique Héraclite qui enseignait que tout est soumis à la loi du devenir, et par conséquent se transforme sans cesse. C’est pour cela qu’il disait qu’on ne peut pas se baigner deux fois dans le même fleuve.
Les bouddhistes, eux aussi, nous parlent du caractère impermanent de la vie et de la souffrance qui provient la disparition de ce à quoi nous sommes attachés.
Peut-on échapper au désagrément voire à la douleur de la perte ?
Une des célèbres formules utilisées dans l’Antiquité était le « Memento Mori » qui signifie « souviens-toi que tu mourras ». On dit que lorsque l’empereur de Rome était porté en triomphe à l’occasion d’une victoire militaire, un esclave se tenait à côté de lui sur son char et lui murmurait cette maxime à l’oreille pendant tout le défilé, afin de lui rappeler que la gloire présente était destinée à disparaître et qu’il ne fallait donc pas s’y attacher outre mesure.
Les stoïciens en faisaient une pratique philosophique par une méditation sur la mort. Réfléchir à la mort n’avait rien de pessimiste ou de morbide pour les Anciens. C’était se familiariser avec une loi de la vie qui portait en elle-même l’idée de régénération, puisque c’est parce que les choses meurent que d’autres peuvent arriver à l’existence. Cet exercice mental facilitait le détachement pour ne pas être déstabilisé par le caractère transitoire des choses. Il aidait beaucoup à relativiser l’importance que nous accordons aux événements.
Essayons de nous rappeler ce sujet qui nous a beaucoup préoccupé hier. Que reste-t-il de lui aujourd’hui ? Et si nous considérions toute chose du point de vue de la fin de notre vie, quelle place auraient-elles ?
Tout passe, l’agréable comme le désagréable. Et un jour tout cela disparaîtra totalement. Oser cette réflexion permettait d’ouvrir un espace intérieur où chaque situation pouvait trouver sa véritable place et de se libérer de poids émotionnels négatifs et inutiles.