Histoire

Napoléon 1er

«l’Alexandre» des temps modernes

Deux cents ans après les «cents jours» de Napoléon Bonaparte qui ont mené à sa chute, que reste-t-il de cet homme, dont le destin s’est scellé en moins de vingt ans, à l’instar d’Alexandre le Grand et qui a secoué la France et le monde ? Plus qu’une légende et un mythe, Napoléon a laissé de nombreuses traces tant au niveau militaire, politique, qu’artistique et administratif en France et particulièrement à Paris, qu’il a rêvé comme une capitale européenne.

Napoléon En 2015, plusieurs expositions rendent hommage la grandeur de ce personne historique hors du commun (voir encadré). Premier consul, empereur, grand stratège et génie militaire (il devint général à vingt-quatre ans), conquérant, homme d’honneur et de nation, doté d’un immense pouvoir d’entraînement sur les hommes et de qualités intellectuelles exceptionnelles (capacité d’analyse, mémoire…), bâtisseur, promoteur d’une administration moderne, il a régné sur l’Europe en despote (il est précurseur de l’Union européenne) et a contribué à moderniser les nations, la France en tête.

«Il vole comme l’éclair et frappe comme la foudre»

Né à Ajaccio en Corse, Napoléon Bonaparte (1769-1821), devint militaire. Il se fit remarquer quand la Révolution française éclata d’abord par sa lutte contre les Anglais au siège de Toulon, puis par sa sympathie pour la cause des Jacobins et sa répression contre les Royalistes, lors de la Convention en 1795. Nommé à la tête des armées en Italie, il se distingua contre les Autrichiens à qui il imposa le traité de Campo-Formio en 1797 avant de  partir à la conquête de l’Égypte, ce qui lui vaudra cette célèbre phrase : «Du haut de ces pyramides, quarante siècles vous contemplent» avant d’être vaincu par les troupes anglaises de l’amiral Wilson. Revenu en France, Napoléon Bonaparte fomenta un coup d’état les 18-19 brumaire (novembre) 1799 et se fit nommer Consul provisoire avant de devenir au terme de la nouvelle Constitution de l’an VIII, Premier Consul, mettant fin à la Révolution.

Paris, rêves d’une capitale et la naissance du style «Empire»

À la tête de la France, il entreprit de nombreuses réformes dans l’administration, le système judiciaire, l’éducation et la finance. Il créa entre autres la Banque de France, promulgua le Code civil, fonda la plupart des grandes institutions administratives actuelles : préfecture de Paris et de Seine, Université, Banque de France, École polytechnique, Légion d’honneur, lycées… La police fut réorganisée au service de l’État avec pour mission de surveiller tous les bâtiments accueillant du public (journaux, théâtres, commerces cafés, jardins publics…) et tous ceux qui avaient une opinion hostile au pouvoir (notamment à l’occasion du complot de Cadoudal visant à renverser Napoléon 1er consul ou de la tentative d’attentat contre l’empereur). Grâce au concordat signé avec le pape Pie VII, la religion catholique devint la «religion de la grande majorité des citoyens français» (et non la religion d’Etat), la loi de 1795 séparant l’Église de l’État fut abolie, et les évêques seraient désormais nommés par le Premier consul, Napoléon Bonaparte.

Palais BourbonNapoléon Bonaparte lança également de grands travaux à Paris dont beaucoup ne seront achevés que sous le règne du roi Louis-Philippe 1er : construction de monuments (colonne de la Grande Armée ou colonne de Vendôme, Palais de la Bourse, fontaine du Châtelet, Temple de la Gloire aujourd’hui appelé Église de la Madeleine, arcs de triomphe du Carrousel et de l’Étoile, percement de la rue de Rivoli.. ), introduction du métal dans l’architecture de la cité ; édification d’équipement d’utilité publique (création de ponts sur la Seine, canaux, fontaines, marchés, halles, abattoirs, cimetières, meilleure distribution de l’eau…) ; première numérotation rationnelle des maisons d’après le système mis au point sous l’Empire.

 

Entre 1800  et 1815, Paris devint le centre de la vie politique, diplomatique et mondaine du «Grand Empire» où confluèrent les élites de la nouvelle Europe (création de la noblesse d’Empire, tenant de rapprocher les nouvelles élites issues de la Révolution et l’ancienne noblesse). Sous Napoléon 1er , «la plus belle ville qui puisse exister », qui se voulait capitale de l’Europe, connut un luxe, un style sans précédents : en matière de peinture et de sculpture, style troubadour, (né avant la Révolution, se poursuivit sous l’Empire pour s’éteindre sous le Second Empire), avènement du pré-romantique Prud’hon ; dans le domaine des arts décoratifs, les grandes manufactures (notamment Sèvres) de Lyon et de Paris et les ébénistes fabriquèrent de beaux costumes, meubles, objets de vaisselle, avec un style d’une surprenante modernité, le «style Empire» pour le Palais des Tuileries et les principales résidences impériales et celles des dignitaires et des courtisans. Les prémices du style Restauration étaient déjà perceptibles dans différents domaines décoratifs, annonçant bien souvent des inventions du XIXe ou au début du XXe siècle. L’art du Premier Empire se répandit dans toute l’Europe.

«C’est le succès qui fait les grands hommes», la politique de conquête

NapoléonÀ partir de 1800, le général Bonaparte repartit en guerre contre ses ennemis européens : d’abord contre les Autrichiens en Italie qu’il réussit à évincer, récupérant au passage la rive gauche du Rhin et faisant signer la paix aux Britanniques. Échappant de justesse à un attentat des royalistes, cet événement lui donna l’occasion de se faire élire Consul à vie par la Constitution de l’an X, avant de d’être sacré empereur à Paris (et non plus à Reims) en 1804 par le pape Pie VII. Napoléon Bonaparte se fit appeler Napoléon 1er.

Ensuite, l’empereur reprit sa lutte contre les Anglais, essuya une défaite à Trafalgar puis combattit la coalition Russie-Autriche-Suède-Naples. Après la victoire d’Austerlitz et la signature du traité de Tilsit qui permit à la France de se voir restituer les colonies conquises par les Anglais et de partager l’Empire ottoman avec la Russie, Napoléon 1er ordonna la mise en place d’un blocus continental contre l’Angleterre (interdisant à tous les navires anglais d’accoster dans les ports) et plaça ses alliés aux endroits les plus stratégiques : son frère Joseph Bonaparte devint roi d’Espagne, son frère Jérôme roi de Westphalie, son beau-fils Eugène de Beauharnais, vice-roi d’Italie, son beau-frère, le maréchal Murat, roi de Naples et le maréchal Bernadotte héritier du trône de Suède… Ce fut la «France-Europe» selon l’expression de Mme de Staël  ! Les Britanniques vinrent aider les nationalistes espagnols à chasser les armées françaises d’Espagne. Ce fut la première grande défaite de l’Empire napoléonien.

L’Autriche attaqua la Grande Armée présente en Allemagne. Napoléon 1er remporta la bataille de Wagram en 1809 et signa un armistice avec l’Autriche. L’Empire de Napoléon s’étendit alors sur une surface de 750 000 km² avec 130 départements en 1811 et une population de 45 millions d’habitants.

De 1809 à 1812, Napoléon 1er dirigea de près ou de loin toute l’Europe sauf l’Angleterre et la Russie. Il était roi de France mais également roi d’Italie, médiateur de la Confédération helvétique et protecteur de la Confédération du Rhin.

L’empereur divorça de Joséphine pour raison d’État (elle ne lui avait pas donné de descendants) et épousa en 1810 Marie-Louise, fille de François 1er empereur d’Autriche et petite-nièce de la reine Marie-Antoinette.

«La conquête m’a fait ce que je suis ; la conquête seule peut me maintenir.»

La fin du règne de Napoléon

En août 1811, le tsar Alexandre 1er, violant le traité de Tilsit, laissa les navires anglais entrer dans ses ports. Napoléon leva une armée de plus de 700 000 hommes composée de Français, d’Italiens, d’Autrichiens et d’Allemands et en 1812 marcha sur la Russie où il remporta de nombreuses victoires, arrivant dans Moscou. Les Russes incendièrent la ville et l’hiver empêcha la Grande Armée de poursuivre les armées du Tsar. Cette dernière fut contrainte de battre en retraite et après la défaite de la Bérézina, décimée par le froid et la faim, elle rentra en France. Après plusieurs batailles contre les armées russo-prussiennes tantôt favorables tantôt défavorables à l’Empereur, Napoléon Ier fut vaincu à Leipzig en 1813 («bataille des nations»). Il se replia en France.

En 1814, la Grande-Bretagne, la Russie, la Prusse et l’Autriche formèrent une armée commune envahissant la France, jusqu’à Paris. Napoléon 1er abdiqua à Fontainebleau.

Le Congrès de Vienne, le remodelage de l’Europe

Carte du Congres de Vienne

Paris subit l’occupation étrangères et deux changements de régime en quelques mois : abdication de Napoléon (avril 1814) et exil à l’île d’Elbe ; restauration par les Alliés des Bourbons sur le trône de France avec le roi Louis XVIII ; signature entre les Alliés et Louis XVIII du premier Traité de Paris  (30 mai 1814), ramenant les frontières de la France à celles de 1792 ; débarquement de Napoléon 1er dans le golfe de Juan (Alpes maritimes) ; l’armée qui devait l’arrêter se rallia à l’ancien souverain et marcha à Paris ; Napoléon 1er reprit le pouvoir pendant cent jours (20 mars-22 juin 1815).

Pendant ce temps, les souverains et les diplomates se réunirent à Vienne, sous l’égide de l’empereur François 1er , austro-hongrois et de son chancelier et ministre des Affaires étrangères, l’habile prince Clément Lothaire de Metternich (42 ans), pour remodeler les frontières de l’Europe, bouleversée par 25 ans de guerres. Le personnage principal en fut Talleyrand, prince de Bénévent rallié aux Bourbons, et nouveau «prince de Machiavel», négociateur français sans égal, aux côtés des souverains, du chancelier autrichien Metternich et des autres plénipotentiaire, qui permit à la France de retrouver sa place dans le concert des Nations et des négociations. Le 9 juin 1815, l’Acte final du Congrès de Vienne fut enfin signé, neuf jours avant la défaite de Waterloo qui mit l’empereur des Français définitivement hors-jeu. Cet épais document de 300 pages en français (la langue universelle de l’époque) redéfinit les contours de l’Europe après la chute de Napoléon 1er et la défaite des armées françaises. Le royaume de Saxe, allié de la France, fut sauvé pendant que la Prusse annexa les anciennes petites principautés de Rhénanie, s’installant à l’ouest de l’Elbe, avec une frontière commune avec la France (Berlin n’aura désormais de cesse de réunir les deux parties de son territoire, l’une à l’extrémité orientale de l’Allemagne, l’autre à son extrémité occidentale). Le grand-duché de Varsovie fut partagé entre la Pologne et la Russie ce qui entraîna l’assujettissement des Polonais à leur voisins. Les Belges furent réunis à leurs frères ennemis du nord dans le royaume des Pays-Bas. Les Italiens de Lombardie et de Vénétie formèrent un «royaume lombardo-vénitien», partie intégrante de l’empire d’Autriche !

 

Cet acte du Congrès de Vienne élabora un retour à l’ordre monarchique et aux valeurs de la religion. Il inaugura également de nouvelles pratiques, reposant sur l’adhésion à des principes communs, dont certains, hérités des Lumières, inspirèrent la déclaration sur la liberté de navigation et de commerce sur les grands fleuves et la décision de mettre fin à la traite des Noirs. Ces principes de règlements de différends et de conflits par une concertation européenne, furent appliqués jusqu’à la Première guerre mondiale. Au final, les grandes dynasties, dont celle des Habsbourg, furent solidement rétablies sur leur trône.

 

Les puissances européennes (britanniques, hollando-belges, allemandes, prussiennes, russes et autrichiennes) formèrent une nouvelle coalition et écrasèrent l’armée napoléonienne à Waterloo le 18 juin 1815. Napoléon 1er abdiqua pour la seconde fois le 22 juin 1815 et fut exilé sur l’île Sainte-Hélène (territoire britannique) où il mourut en 1821.

Aujourd’hui que reste-t-il de Napoléon 1er ?

Le code civil a été maintenu dans de nombreux pays. Nombre d’institutions ont été conservées. Ses grandes batailles sont représentées à travers tableaux, films, reconstitution en musées.

En 1840, le roi Louis Philippe rapatria la dépouille de Napoléon 1er aux Invalides à Paris.

Avec l’avènement du Second Empire (1852), le culte officiel de Napoléon Ier atteignit son apogée. Napoléon III et le préfet Haussmann donnèrent aux rues du nouveau Paris des appellations qui rappelaient les batailles et les généraux du Premier Empire.

 

Par Marie-Agnès LAMBERT

 


LivreCampagne de Russie

Curtis CATE

Editions Tallandier, 720 pages, 12 €

Cet historien américain nous livre une version percutante de la campagne de Russie. Il dresse une fresque haute en couleurs de cette tragédie vue, tant du côté russe que français. Les ressorts secrets des deux camps, leurs stratégies, leurs intuitions, leurs erreurs sont relatées dans un style nerveux qui rend vivant et passionnant ces 600 pages d’une épopée homérique. Pénible leçon sur les incroyables souffrances endurées par des milliers d’hommes pour satisfaire une ambition.

 


Livre

Napoléon ou La destinée

Jean-Marie ROUART

Éditions Gallimard, 348 pages, 21,90 €

L’auteur s’attache à décrire l’un des hommes les plus connus de France et du monde entier dont on connaît le génie militaire et les talents politiques. Il brosse le portrait d’un homme qui faisait toujours face à l’adversité, qui était bourré de contradictions et d’ambiguïtés de tous ordres, à l’image de la France. Napoléon a commencé à embrasser les idées de la gauche, avant de devenir jacobin puis Premier consul et empereur…Il a su rassembler les Français au combat, dans une belle leçon de courage, les entraînant vers leur destin, car sa préoccupation de grandeur et de postérité dans l’Histoire était grande. Mais dans la vie privée, il était un petit garçon, devant les femmes et son entourage, il avait des faiblesses.

 


Livre

Napoléon chef de guerre

Jean TULARD

Éditions Tallandier, 378 pages, 24 €

Le génie militaire de Napoléon a plus fasciné que son génie politique. Ce livre tente de comprendre comment l’empereur préparait la guerre, la façon dont il la menait. Il intervenait dans les moindres détails : connaissance de la topographie, analyse des mouvements ennemis, lecture d’œuvres de grands stratèges pou y puiser une inspiration, guerre psychologique (menée par la presse, la guerre illustrée dans la peinture…). Napoléon eut une influence importante sur des officiers militaires du XXe siècle (Foch, Joffre, De Gaulle…) et sur le choix des ennemis (Les Prussiens deviendront les ennemis, remplaçant les Anglais). Par un professeur à la Sorbonne, spécialiste de la période des périodes de la Révolution, du premier et du Second Empire.

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