70e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, Que sont devenus les droits de l’homme aujourd’hui ?
Le 10 décembre, la Déclaration universelle des Droits de l’Homme fêtera son soixante-dixième anniversaire. Adoptée en 1948 par l’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies (O.N.U.), traduite en cinq cents langues, elle proclame les droits inhérents à toute personne humaine dans le monde. Aujourd’hui, il semble que de très nombreuses personnes ne jouissent toujours pas de droits et de liberté.
Il a fallu deux guerres mondiales pour que les droits humains deviennent internationaux voire universels.
Le 24 Octobre 1945, l’Organisation des Nations Unies (O.N.U.) (1) voit le jour. Elle réunit des États pour prévenir les conflits armés et se préserver des violences des deux Guerres mondiales qui « deux fois en l’espace d’une vie humaine ont infligé à l’humanité d’indicibles souffrances ».
Le 10 décembre 1948, 48 États de l’O.N.U. signent la Déclaration universelle des Droits de l’Homme à Paris, au Palais de Chaillot.
« Considérant que la méconnaissance et le mépris des droits de l’homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l’humanité, l’événement d’un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère a été proclamé comme la plus haute aspiration de l’homme» (Extrait du préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme).
Les droits de l’homme, inaliénables et universels
Les droits décrits dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme sont de toute nature. D’une part, ils sont :
– civils
– politiques, (liberté d’expression, liberté d’opinion, liberté de manifester, de penser, de croyance religieuse, droit des minorités, interdiction des discriminations, de la torture, de l’esclavage et droit à la vie),
– sociaux (droits à la sécurité sociale, à la santé, à la protection de la famille et des enfants)
– économiques (droit au travail),
– culturels (droits à l’éducation, à la formation).
D’autre part, ils sont :
– inaliénables (personne ne peut être privé de ces droits innés),
– interdépendants (ils sont tous liés et ont tous la même importance),
– universels(ils s’appliquent à tous, partout dans le monde).
Ils constituent un idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations.
Aujourd’hui, que sont-ils devenus ?
Un monde en bouleversement perpétuel
Depuis 1948, le monde n’a cessé d’évoluer à une vitesse considérable et avec des évènements historiques prévisibles mais également inattendus : bouleversements géopolitiques, changements de frontières et d’alliances entre pays, augmentation des conflits et des guerres, exodes de populations, crises économiques et sociales…
Malgré d’importantes avancées – combat contre la peine de mort, contre les crimes de guerre et crimes contre l’humanité, contre le terrorisme, contre toutes les discriminations… – de nombreux États et entreprises continuent à violer les droits de l’homme et à être complices de crimes en toute impunité. De très nombreuses personnes ne jouissent toujours pas de droits et de libertés. Même l’O.N.U. semble impuissante à les faire respecter tant les intérêts politiques et économiques l’emportent sur les simples droits humains.
Pour le Jordanien Zeid Ra’ad Al Hussein, haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’O.N.U., défendre des droits de l’homme est les prémices de nouveaux conflits, mais ne pas le faire, c’est promouvoir l’égoïsme. « Défendre les droits d’une communauté contre d’autres communautés, c’est créer les conflits de demain. Les violations des droits de l’homme d’aujourd’hui sont les conflits de demain.Quelle humanité veut-on ? Une humanité où lorsqu’on est menacé par la guerre, la mort, personne ne vous accueille ? C’est ce que ces populistes tentent de promouvoir. C’est de l’égoïsme. Et ce sera terriblesi nous ne résistons pas. » (2)
Les droits de l’homme, une situation alarmante en 2017
En 2017, l’association Amnesty international a rendu son rapport sur la situation des droits de l’homme étudiés dans 159 pays. Kumi Naidoo, son secrétaire général, militant chevronné sud-africain anti-apartheid de la première heure et ancien directeur exécutif de Greenpeace constate :
« Tout au long de l’année 2017, de très nombreuses personnes, qui vivaient déjà dans l’insécurité et la pauvreté ont vu leur situation aggravée par les conflits, les mesures d’austérité et les catastrophes naturelles. Des millions de gens ont été obligés de fuir et de chercher refuge ailleurs, dans leur propre pays ou à l’étranger. La discrimination est restée monnaie courante dans toutes les régions du monde avec dans certains cas, des conséquences mortelles pour les victimes. » (3)
Cependant, de plus en plus de personnes et d’organismes luttent pour la défense des droits de l’homme et leur situation est très alarmante.
« Des gouvernements de toutes tendances politiques ont continué de réprimer la liberté d’expression, d’association et de réunion, notamment en menaçant et attaquant des journalistes, des défenseurs de droits humains et écologistes. […]Dans toutes les régions, des millions de femmes et d’hommes se sont dressés contre l’injustice et ont réclamé que leurs voix soient entendues et leurs droits respectés, faisant rayonner avec courage, leur détermination dans ces sombres circonstances », dit encore Kumi Naidoo (2).
Il ajoute : « En 2017, au moins 312 défenseurs ont été assassinés (4), soit deux fois plus qu’en 2015, et dans presque tous les cas les responsables ont agi en toute impunité. » (3) Il a annoncé qu’un plan d’action « historique » en faveur de la protection et de la promotion du travail des militants et militantes qui se battent pour les droits de l’homme, serait présenté à l’O.N.U., en décembre. « Le plan d’action espère apporter une réponse à ces injustices et soutenir « ces défenseurs », afin de leur permettre de poursuivre leur travail essentiel dans un environnement sûr. […]Le niveau de danger auquel sont confrontés les militants de par le monde a atteint un point critique » (5).
De même que des hommes et des femmes agissent collectivement pour défendre les droits de l’homme, il nous appartient individuellement de mettre en place des mesures pour agir dans notre entourage, à notre modeste dimension.
Pratiquer la tolérance
Tous les êtres humains font partie de la même humanité. L’unité dans la diversité.
Pratiquer la tolérance c’est accepter l’autre dans sa différence, s’enrichir de la diversité humaine, comme la diversité fait la richesse et la beauté de la Nature.
Accepter les différences, c’est porter un regard bienveillant et ouvert sur les autres, à ceux qui en ont besoin dans notre entourage et aussi à ceux que nous ne connaissons pas. Nous pouvons comprendre que l’autre est une partie de nous-même, « parce que c’était lui, parce que c’était moi », disait Montaigne (6).
Accepter les différences c’est également respecter la dignité de chacun et l’aider à la retrouver par des gestes simples matériels mais également affectifs.
Nous sommes tous interdépendants
En vivant ensemble, nous sommes interdépendants les uns des autres, comme tous les organes du corps collaborent ensemble afin que nous puissions vivre quotidiennement. Nous avons tous besoin les uns des autres et en même temps, nous faisons tous partie d’une même chaîne, comme les perles forment un collier. Ensemble nous sommes plus forts et nous allons plus loin. L’union fait la force mais la force fait l’union.
Développer la fraternité universelle
En fondant la Société théosophique avec Henry S. Olcott, Hélena Petrovna Blavatsky avait l’idée de créer un noyau de fraternité universelle dont l’action se déclinerait sous trois principes :
– Former un noyau de fraternité universelle, sans distinction de race, d’opinion, de nationalité et de condition sociale.
– Encourager l’étude comparée des religions, des sciences et des arts.
– Étudier les pouvoirs latents de l’homme et les lois inexplorés de la nature.
Cette idée a été reprise par l’association internationale Nouvelle Acropole, fondée en 1957 par Jorge Angel Livraga. Elle œuvre dans plus de soixante pays dans le domaine de la culture, de la philosophie et du volontariat, en cherchant à travers la philosophie à donner un sens aux actions et à devenir meilleur pour créer un monde meilleur.
Pratiquer la philosophie
Pratiquer la philosophie permet d’abord de s’enrichir de toutes les sagesses anciennes et actuelles qui mettent l’homme au premier plan dans toute sa grandeur et sa dignité.
L’étude de la philosophie développe le discernement (sortir des opinions et des croyances) et change la vision du monde (voir au-delà des apparences).
Grâce à la philosophie, nous pouvons entrer en meilleure relation avec nous-même, les autres et comprendre le monde dans lequel nous vivons. Nous pouvons nous relier à l’humanité, dans une relation d’âme à âme, sans barrière ni limitation et étant unis à tout le monde sans exception.
Pratiquer la philosophie permet enfin de mieux se connaître, de se changer soi-même et de donner un sens à nos actions pour créer une civilisation basée sur des valeurs plus humaines et justes.
Aujourd’hui, dans le monde obscur de la caverne, dans lequel règne la séparativité, l’intolérance, l’absence de respect, il est urgent de changer la tendance, de redonner à l’homme sa dignité et de lui rendre ses droits fondamentaux. Qu’attendons-nous ?
(1) L’O.N.U. est le prolongement de la Société Des Nations (S.D.N.), créée en 1919 avec pour mission de préserver la paix. La crédibilité de cette dernière a été remise en cause quand l’Allemagne a déclaré la guerre, entraînant la Seconde Guerre mondiale
(2) Extrait de l’article paru dans le Monde, Zeid Ra’ad Al-Hussein : « Les violations des droits de l’homme d’aujourd’hui sont les conflits de de demain » par Remy Ourdan, le 1eraout 2018
(3) Extrait du Rapport Amnesty International de 2017
(4) Contre 281 en 2016
(5) Extrait de l’article Des défenseurs des droits humains réunis à Paris, paru dans Le Figaro en collaboration avec l’Agence France Presse, le 31/10/2018
(6) Auteur des Essais.Montaigne fait allusion à son ami La Boétie
Par Marie-Agnès LAMBERT
Saison en droits
8 décembre 2018 – 30 juin 2019
À l’occasion du soixante-dixième anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, le Musée de l’Homme a sélectionné neuf articles qui entrent particulièrement en résonnance avec son histoire et les valeurs humanistes qu’il porte.
Onze artistes les ont réinterprétés à leur manière. Expositions de photographie, de street art et d’histoire, performances, événements, danse, table ronde sur les migrations, accrochages photographiques, expositions, conférences d’historiens et de personnalités engagées… autant d’évènements pour rappeler l’importance des droits de l’homme aujourd’hui.
Musée de l’Homme
17, place du Trocadéro – 75016 Paris 16e– Tel : 01 44 05 72 72 – contact.mdh@mnhn.fr– museedelhomme.fr
Soixante-dixième anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme à Paris
Le 10 décembre, Anne Hidalgo, Maire de Paris et Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme des Nations unies, invitent les Parisiens autour de la Journée des Droits de l’Homme, pour un temps de rencontre et d’échange sur Les droits humains aujourd’hui, au Palais de Chaillot. À leurs côtés, seront présents plusieurs ONG agissant pour les droits de l’Homme et d’autres invités du monde associatif et culturel.
Du 5 décembre 2018 au 2 janvier 2019, l’exposition Un pour tous, tous pour un. Chacun peut défendre les droits de l’Homme dans sa vie présentera sur les grilles de la Tour Saint-Jacques des affiches lauréates du concours international lancé auprès de 100 graphistes du monde entier, en partenariat avec l’association Poster for Tomorrow.
Durant tout le mois de décembre, une grande campagne de sensibilisation aux droits de l’Homme sera présentée aux Parisiens et visiteurs avec des affiches sur le réseau J.C Decaux mais aussi dans plus de 1 000 établissements publics, sur les réseaux sociaux parisiens, et dans le magazine À Paris.