Pratique philosophique : #15 Se libérer des écrans

Combien de fois vous êtes-vous retrouvé à regarder votre montre avec horreur après avoir passé un temps que vous pensiez raisonnable sur votre écran ? Bienvenue dans le grand piège des écrans digitaux ! Ils nous attrapent dans leurs filets et leurs algorithmes, destinés à nous garder le plus longtemps possible, nous font perdre la maîtrise de leur utilisation.
Le diagnostic des médecins est sans appel : les écrans détruisent notre concentration au profit d’une attention « papillon » incapable de se fixer et qui éprouve le besoin permanent d’être stimulé.
Les philosophes nous alertent également. Le divertissement que procurent les écrans est un piège qui nous détourne de l’essentiel. Dans ses Pensées, Pascal décrit le divertissement comme une manière pour nous, les humains, de nous détourner de la réalité de notre condition mortelle et misérable. En clair, écrit-il, nous cherchons constamment des distractions pour éviter de penser à des vérités désagréables, comme la mort, la misère et l’ignorance.
Le bonheur dans la distraction ?
Heidegger dans Être et Temps va dans le même sens : nous nous divertissons parce que nous sommes essentiellement malheureux mais, comme un cercle vicieux, la distraction nous empêche de trouver le bonheur : « Si l’homme était heureux, il le serait d’autant plus qu’il serait moins diverti ».
Cette idée de distraction de l’essentiel est présente dans beaucoup de traditions philosophiques, où elle est souvent vue comme un obstacle à la réalisation de soi et à la quête de la vérité.
C’est le désir qui provoque la distraction. Désirer des choses superflues nous distrait de ce qui est réellement important. À trop aimer ce qui n’est pas nécessaire, on devient esclave de l’accessoire et on perd la direction de sa propre vie.
Retour vers l’essentiel
C’est pourquoi le bonheur n’est pas dans le divertissement, souligne Pascal, car il n’apporte qu’une satisfaction passagère. Le véritable bonheur ne peut naître que d’un contact avec notre être profond, contact qui est rendu impossible par la distraction permanente de notre esprit. Il nous faut donc parvenir à résister au désir qui nous jette dans les bras des pourvoyeurs de distraction.
Pour nous détacher du désir et nous auto-réguler, les stoïciens, par exemple, nous invitent à passer un pacte avec nous-mêmes.
Commençons par une heure où nous ne regardons pas notre application préférée. Puis renouvelons le pacte le lendemain, et ainsi de suite, pour atteindre progressivement l’objectif de ne pas regarder telle ou telle application pendant une journée.
Notons dans notre cahier de réflexion les bénéfices que nous apporte cette pratique pour nous encourager dans cet effort !